Quelques prémisses…
L’objectif
Le but premier de cet exercice d’analyse n’était pas l’analyse pour l’analyse; il est vrai qu’un tel travail forge bien les réflexes d’analyse et fournit un certain entraînement pour de futurs travaux connexes ou non, seulement, il aurait été un peu bête d’écrire plein de petits chiffres romains sous des portées sans un quelconque dessein en bout de ligne. C’est amusant, soit, mais ça n’apporte rien. Le but à atteindre était d’abord de chercher les constantes du discours harmonique et/ou mélodique et/ou formel chez Mozart, de découvrir ses tics, de rendre compte de sa personnalité à travers son œuvre. Ensuite, ce fut une agréable excuse pour se familiariser avec une facette de la forme sonate – étant étudiante en composition, analyser des formes sonates s’avère être bien plus efficace que la lecture d’un livre sur le sujet.
C’est d’ailleurs dans l’optique d’une étude connexe à mon programme de composition que j’optai pour les sonates pour piano; il aurait été fort intéressant de se pencher sur les quatuors à cordes de Mozart, mais c’est sur l’écriture pianistique que je jette mon dévolu en tant que compositrice, alors le choix s’avère logique, selon le parcours que je désire suivre.
Et pour Mozart? Mmm… je n’ai pas de réponse clairement objective. Goût personnel, voilà.
Le choix des oeuvres
Afin de limiter les perspectives, il a fallu faire un choix parmi les mouvements de sonates pour piano de Mozart. Choisir les mouvements de forme sonate apporte beaucoup d’avantages; cette forme présente assez de constantes pour pouvoir bien faire état des caractéristiques particulières au style de Mozart, et la forme en elle-même est découpée assez visiblement pour pouvoir tirer plus facilement les conclusions qui s’imposent sur les constantes par rapport à leur position dans la forme.
Cependant, et voilà le grand hic, afin d’éliminer les mouvements qui ne sont pas de forme sonate, encore faut-il être en mesure de définir très clairement ce qui est une forme sonate par rapport à ce qui n’en est pas une. La définition qu’offre Charles Rosen est, ma foi, beaucoup plus large qu’on ne pourrait l’imaginer; il va jusqu’à affirmer que dès qu’un deuxième groupe de thème apparaît à la fois dans le ton de la dominante (ou un substitut de la dominante) dans l’exposition et dans le ton de la tonique dans la réexposition, on a là une forme sonate. Peu importe les ponts, les modulations, peu importe s’il y a développement ou pas, un nouveau thème dans le développement, s’il y a coda, car c’est là la seule et unique condition pour avoir une forme sonate, car celle-ci se veut en fait rien d’autre que la dramatisation de la dualité entre deux tons opposés – c’est un jeu de tension et de résolution, échelonnés sur toute la forme. Il ne faut donc qu’un thème exposé dans un ton qui ajoute la tension ainsi qu’une réexposition dans un ton qui résout cette tension pour avoir une forme sonate. C’est sur cet argument que s’est basé le choix des mouvements à ajouter au corpus à analyser.
Il a fallu éliminer deux sonates; après une petite recherche à saveur musicologique, nous sommes arrivés à une conclusion par rapport aux deux sonates qui n’apparaissaient pas dans l’édition de l’intégrale des sonates pour piano de Mozart que je possédais (éditions Henle Verlag) et qui apparaissent dans l’édition de l’intégrale de la responsable du travail dirigé, Luce Beaudet (éditions Shirmer). Ces deux sonates (qu’on désigne sous les Koechel 498a et 547a) se sont avérés être, selon Douglas Himes (1), pour l’un, une fausse attribution (K. 498a) et pour l’autre, la transcription d’une sonate pour violon et piano (K. 547a). Ces deux sonates n’ont donc pas été retenues.
Au total, trente-trois mouvements ont été analysés. Il est à noter que la sonate no 11 en La majeur (K. 331) n'a pas du tout été touchée, puisqu'aucun de ses mouvements ne comporte de forme sonate.
Les troisièmes mouvements des sonates no13 en si bémol majeur (K. 333) et 14 en do mineur (K. 457) sont effectivement des formes sonates, mais elles n'ont pas été analysés, faute de temps (dois-je rappeler à mes chers lecteur que ceci est loin d'être un mémoire de maîtrise... ce n'est qu'un petit sujet spécial de baccalauréat).
(1) HIMES Douglas, W.A. Mozart’s sonatas for solo clavier : recent developments in chronology, transmission, and biographic context, pp 187-190, pp164-178