Reçu d'Alan Belkin

25 de l'avant christmasse 2005

Cette lettre est signée par autour de 40 profs, de diverses facultés ...
dont moi [Alan Belkin]. Elle est maintenant partie au SGPUM (notre syndicat) ainsi qu'à
l'association étudiante; tous les collègues devront recevoir une copie d'ici
un jour ou deux.

Réflexions sur le conflit de travail à l’Université de Montréal  

N.B: cette lettre est née d’une initiative indépendante d’un groupe de professeurs de l’Université de Montréal. Elle se veut constructive et n’a fait l’objet d’aucune pression de la part de l’administration de l’UdeM.

Depuis le 19 octobre dernier, le Syndicat général des professeurs de l’Université de Montréal (SGPUM) a déclaré une succession de journées de grève des professeurs pour faire avancer les négociations dans le conflit de travail qui l’oppose à l’employeur. Depuis lors, douze journées de grève ont été tenues, annulant à toute fin pratique toute activité académique sur le campus. Un point de non-retour est maintenant atteint et il semble que le semestre sera perdu. Par la présente, nous désirons exprimer notre désaccord face à ce mouvement de grève et exhortons les deux parties à trouver une solution dans les plus brefs délais.

Nous exprimons notre dissidence envers les tactiques démesurées du SGPUM pour faire valoir nos revendications, si légitimes soient-elles. Les étudiants de l’Université de Montréal porteront presque exclusivement le fardeau d’une dispute qui n’est pas la leur tandis que les membres du SGPUM n’en souffriront que très peu. Nous trouvons cet état de fait déplorable.

Il y a plusieurs aspects fâcheux dans ce conflit et nous voulons exprimer un point de vue auquel on a fait peu de place dans les communications du syndicat.

Le seul point de litige concerne les conditions salariales. Il existe une myriade de techniques pour éclairer, sous un jour ou sous un autre, l’évolution des offres mais après deux offres patronales et une contre-proposition syndicale, l’écart entre les deux parties est maintenant réduit à des augmentations de 2,3 % pour la première année de l’entente. La première année de l’offre se chiffre à 3,6% et les deux dernières années à 4 % par année soit un total de 12,06% sur trois ans. L’argument voulant que les professeurs de l’Université de Montréal soient dévalorisés et bafoués par cette offre de l’employeur nous apparaît hautement discutable. Au salaire moyen de 85 000 $, le 2,3 % de dispute représente, après impôts, environ 80 $ par mois d’accroissement du revenu réel. C’est essentiellement pour cette somme que le semestre académique de plus de 50 000 étudiants est compromis. S’il y a un programme politique au-delà de cette question, il a été fort mal expliqué.

La question du G10 et de la piètre position des professeurs de l’UdeM dans la liste de rémunération est un irritant. Nous sommes aussi productifs que nos pairs ailleurs au pays et le rattrapage est donc un objectif légitime, reconnu par l’employeur. Or, comme le faisait judicieusement remarquer Jean-Robert Sansfaçon, dans son éditorial du 22 novembre dans Le Devoir, la parité doit se négocier sur des bases réelles et non absolues. À la fin du mois, un appartement sur le Plateau coûte la moitié de son équivalent dans Cabbage Town. À style de vie égal, plusieurs choisiront Montréal. Et à Montréal, ils choisiront l’Université de Montréal même si les salaires de McGill sont présentement de 6,9 % supérieurs aux nôtres. La dernière offre vient de réduire cet écart à 3,3 %. Comme tous nos collègues, nous croyons qu’un travail doit être rémunéré à sa juste valeur au marché de l’emploi. Cependant, il sera très difficile de faire accepter à qui que ce soit que, dans le contexte montréalais, un salaire moyen de 85 000 $ constitue une insulte à la valeur du travail accompli. Il n’est même pas nécessaire de rajouter à ce chiffre la liste de tous nos avantages sociaux.

Depuis la dernière offre, le SGPUM clame que les revendications salariales sont le fer de lance d’un mouvement beaucoup plus englobant concernant la liberté académique et la qualité de l’enseignement, élargissant ainsi le terrain du conflit. Nous trouvons que cette affirmation nécessite beaucoup de clarifications. Nous savons tous que l’Université de Montréal fera face cette année à un déficit opérationnel de l’ordre de plusieurs millions de dollars. Il est invraisemblable de prétendre que l’argent consacré exclusivement aux augmentations salariales des professeurs n’aura pas d’impact ailleurs. Suivront inévitablement des coupures importantes, à court et à long terme, dans l’embauche de nouveaux professeurs, de chargés de cours et d’assistants d’enseignement, dans l’entretien et le ré-équipement des laboratoires et dans le désengorgement des espaces physiques. Un calcul rapide permet d’établir que, sur les quatre prochaines années , les demandes syndicales équivalent à l’embauche d’une centaine de jeunes professeurs. Après la qualité du corps enseignant, ce sont ces facteurs qui contribuent le plus à la qualité de l’enseignement. À la lumière de ce qui précède, nous ne croyons pas que les demandes salariales contribueront à améliorer les conditions dans lesquelles nous remplissons notre mission, elles les empireront probablement.

Par ailleurs, si la lettre d’entente n o13 constitue une bavure tactique de l’administration qui a été décriée avec vigueur par le syndicat comme constituant une attaque dissimulée sur la liberté académique, il n’en demeure pas moins que, comme constituante essentielle de la communauté universitaire, les professeurs devront bien, un jour ou l’autre, accepter de participer à l’élaboration de stratégies globales visant à améliorer la position financière de notre institution. Un comité paritaire est, précisément, paritaire. Rien dans la lettre n o13 n’indique une attaque directe sur la liberté académique. Si le syndicat y voit une menace, pourquoi alors ne pas accepter d’en débattre en comité paritaire avec l’administration pour justement s’assurer que la liberté académique ne sera pas compromise?

Un aspect important dans cette affaire a été soigneusement omis des discussions : le dégel des frais de scolarité. Il y a plusieurs positions possibles sur cette question, mais celle du SGPUM est sans équivoque : contre. Comment alors expliquerons-nous aux étudiants que nos demandes salariales auront contribué à la nécessité d’aller de l’avant avec ce dégel?

Malgré tout ce qui précède, cette lettre ne se veut pas une motion de blâme envers le SGPUM. Ce que nous déplorons par la présente, ce sont les moyens démesurés qu’il aura utilisés pour arriver à ses fins. Il y aurait eu tant de façons imaginatives de faire valoir nos revendications et il nous attriste beaucoup de constater qu’on aura jugé opportun de rapidement recourir aux moyens les plus draconiens et les plus dommageables pour toute la communauté universitaire, d’autant que jusqu’alors, le syndicat et l’Université avaient toujours réussi à s’entendre à l’amiable.

En terminant, un mot sur la solidarité. Solidarité avec nos collègues. Solidarité avec les étudiants. Solidarité avec la société québécoise tout entière qui supporte notre travail. Sans entrer dans des considérations qui dépassent le contexte de cette lettre, permettez-nous de souligner que le respect que réclame le syndicat de son employeur est le même respect que les professeurs doivent à leurs charges étudiantes et à la société qui les paie.

S’il vous plait, réglez ce conflit au plus vite.

Respectueusement,

Olivier Armantier, professeur adjoint, Arts et sciences
Muriel Aubry, professeure titulaire, Arts et sciences
Jean Barbeau, professeur titulaire, Médecine dentaire
Stéphane Beaulac (Cantab.), professeur agrégé, Droit
Alan  Belkin, professeur titulaire, Musique
Yoshua Bengio, professeur titulaire, Arts et sciences
Guy Boileau, professeur titulaire, Médecine
Walter Bossert, professeur titulaire, Arts et sciences
Anne Bourlioux, professeure agrégée, Arts et sciences
Michel Bouvier, professeur titulaire, Médecine
Gilles Brassard, professeur titulaire, Arts et sciences
Rui Luis de  Castro, professeur adjoint, Arts et sciences
Octav Cornea, professeur titulaire, Arts et sciences
Leonard Dudley, professeur titulaire, Arts et sciences
Jean-Marie Dufour, professeur titulaire, Arts et sciences
Douglas Eck, professeur adjoint, Arts et sciences
Lars Ehlers, professeur agrégé, Arts et sciences
José Evangelista, professeur titulaire, Musique
René Garcia, professeur titulalire, Arts et sciences
Gérard Gaudet, professeur titulaire, Arts et sciences
C. Géraldine Bazuin, professeure titulaire, Arts et sciences
Silvia Goncalves, professeure adjointe, Arts et sciences
Michael Huberman, professeur titulaire, Arts et sciences
Hélène Lebel , professeure agrégée, Arts et sciences
Pierre L'Ecuyer, professeur titulaire, Arts et sciences
Marie-Thérèse Lefebvre, professeure titulaire, Musique
Michel Longtin, professeur titulaire, Musique
Ejan Mackaay, professeur titulaire, Droit
Brigitte Maheux, professeure, Médecine
Patrice Marcotte, professeur titulaire, Arts et sciences
William McCausland, professeur adjoint, Arts et sciences
Claude Montmarquette, professeur titulaire, Arts et sciences
Pierre Moreau , professeur agrégé, Pharmacie
Chantal Pharand, professeure agrégée, Pharmacie
Jean Piché (initiateur), professeur titulaire, Musique
Sébastien Roy, professeur agrégé, Arts et sciences
Marc Servant, professeur adjoint, Pharmacie
Caroline Traube, professeure adjointe, Musique
Kevin Tuite, professeur titulaire, Arts et sciences
Michel Verdon, professeur titulaire, Arts et sciences
Karen Waldron, professeure agrégée, Arts et sciences

Cette grève m'enrage. Les boycotts des profs d'activités culturelles au primaire me met hors de moi. Les moyens de pression sont extrêmement moches; s'en prendre à des gens innocents qui n'ont rien à voir avec le conflit. Mais le pire, c'est que la cause des profs de l'université de montréal est absolument mauvaise. La cause des autres profs, je sais pas trop, je ne connais ni leurs conditions ni leurs revendications; en ce qui concerne le syndicat des professeurs de l'université de montréal, ce sont des revendications de fils de riches. Ça me rend malade.

 

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